Le pangolin transmet-il le coronavirus COVID-19 ?
Rédigé et vérifié par la biochimiste Luz Eduviges Thomas-Romero
En ce moment, la communauté scientifique s’efforce de déterminer si le pangolin transmet le coronavirus COVID-19 ou non. Il est important de noter que les coronavirus (CoV) sont bien connus des virologistes vétérinaires depuis des décennies.
Généralement, les coronavirus affectent les oiseaux et les mammifères de manière spécifique à chaque espèce. Ainsi, des souches spécifiques de coronavirus sont connues pour infecter les êtres humains, les chats, les chiens, les rongeurs, les lapins, les furets, les vaches, les dindes et les porcs.
Dans cet article, nous ferons un bref résumé de ce que l’on sait du COVID-19 jusqu’à présent.
Les coronavirus et l’infection chez les êtres humains
Les coronavirus ont été identifiés pour la première fois à la fin des années 60. Dès lors, on a identifié 4 CoV pouvant infecter les êtres humains (HCoV), et provoquer des infections bénignes légères, telles que le rhume commun.
Curieusement, ces 4 HCoV faiblement pathogènes sont également liés aux coronavirus qui affectent les animaux. Selon plusieurs études qui ont analysé les séquences génomiques actuellement disponibles, on a attribué à ces espèces animales les hôtes naturels suivants :
- HCoV-HKU1 : rongeur naturel
- HCoV-NL63 : chauve-souris naturelle
- HCoV-OC43 : rongeur naturel : intermédiaire au bétail
- HCoV-229E : chauve-souris naturelle : intermédiaire aux alpagas
Coronavirus hautement pathogènes pour les êtres humains
Jusqu’en 2002-2003, les Cov n’étaient pas considérés comme hautement pathogènes pour les êtres humains. A cette époque, une épidémie de coronavirus du syndrome respiratoire aiguë sévère (SARS-CoV) s’est produite dans la province de Guangdong, en Chine. Ce virus s’est propagé à l’échelle mondiale.
Plus tard, en 2012, un autre coronavirus fortement pathogène, le coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV) est apparu en Arabie Saoudite et autres pays du Moyen-Orient. Dans les deux cas, on pense que le virus provenait des chauves-souris. De plus, des preuves ont indiqué que ces espèces sont leurs hôtes intermédiaires :
- SARS-CoV : chauves-souris : civettes masquées des palmiers (Paguma larvata)
- MERS-CoV : chauves-souris : chameaux
- COVID-19 : chauves-souris : intermédiaire ?
C’est en raison de ces deux précédents que l’hypothèse selon laquelle le COVID-19 pourrait également être d’origine animale voit le jour. En effet, les analyses de séquences génomiques confirment que le COVID-19 provient aussi des chauves-souris. Cependant, son hôte intermédiaire n’est pas encore connu.
Si le pangolin est l’hôte intermédiaire du COVID-19, qu’est-ce que cela signifie ?
Normalement, les virus se propagent entre les animaux d’une même espèce. Parfois, ils peuvent se croiser ou “se mélanger” et provoquer une maladie chez une autre espèce.
Par ailleurs, il est important de savoir que les virus peuvent se transmettre des animaux à l’être humain sous deux formes principales :
- Directement depuis l’hôte naturel ou à partir de ses sécrétions contaminées par le virus
- A travers un autre organisme qui fonctionne comme un hôte intermédiaire
Il convient de noter que les gènes des virus sont séparés en segments. Ainsi, le génome segmenté permet aux les virus des différentes espèces de se mélanger ou de se recombiner pour créer un nouveau virus. Dans ces cas, il est fréquent que les virus des deux espèces distinctes infectent, en même temps, la même personne ou le même animal. Ce que l’on appelle la co-infection.
Par conséquent, le nouveau virus a de nouvelles propriétés. Par exemple, il pourrait être capable d’infecter des êtres humains et de se propager facilement d’une personne à l’autre. Créant ainsi une pandémie. En raison de la nouvelle structure du virus, la plupart des personnes ne seront pas ou peu protégées face à l’infection.
Le pangolin transmet-il donc le COVID-19 ?
Les recherches épidémiologiques ont révélé que de nombreux patients étaient exposés à la faune sauvage au marché grossiste de fruits de mer de Huanan. Ce complexe est le plus grand marché de fruits de mer de la Chine centrale. Ils y vendent également différentes espèces de chauves-souris, de visons, de serpents, et de rats de bambou chinois.
En outre, des chats de diverses races, des porcs-épic, des chiens, oiseaux et autres animaux de ferme sont couramment vendus. Ces marchés sont connus comme des “marchés humides”, car ce sont des lieux traditionnels où l’on vend des animaux morts et vivants à l’air libre.
Il est donc facile d’imaginer que le sang et autres fluides corporels provenant de différentes espèces animales représentent une source exceptionnelle de contagion.
D’autre part, il est important de soulever que le pangolin ne figurait pas sur la liste des animaux du marché. Peut-être en raison de l’interdiction de sa commercialisation. Depuis le 1er janvier 2020, le marché municipal des fruits de mer de Chine du Sud est fermé par le gouvernement de Wuhan.
Des preuves que le pangolin transmet le coronavirus
Un groupe de scientifiques nord-américains a identifié une grande similitude de séquence du génome entre le COVID-19 et un génome de coronavirus reconstitué à partir de bases de données de pangolins.
Un autre groupe de l’Université de Hong-Kong a isolé le virus à partir de tissus de pangolin. L’analyse des séquences des génomes viraux a déterminé la présence de deux nouveaux génomes de coronavirus. Les génomes sont environ 85,5 à 92,4% similaires à ceux du COVID-19.
Très récemment, des chercheurs de Guangzhou, en Chine, ont suggéré que les pangolins (Manis pentadactyla) sont les hôtes intermédiaires probables du COVID-19 pour les êtres humains. Cette suggestion est née de la détection de CoV chez les pangolins qui semblent être étroitement liés avec le COVID-19.
Cette information provient des déclarations du recteur de l’Université Agricole du Sud de la Chine. Cependant, elle n’a pas encore été reportée dans un article scientifique. Toutefois, la prudence s’impose dans la gestion de ces informations car les analyses génétiques sont toujours en cours.
Si le pangolin transmet le COVID-19, comment le fait-il ?
Le pangolin est l’animal qui fait l’objet du plus grand trafic sur la planète. Ce petit mammifère est insaisissable, nocturne et couvert d’écailles. Malheureusement, on pense que les diverses parties de son corps, en particulier ses écailles, mais également ses foetus, son sang, ses os et ses griffes, ont des propriétés curatives dans les médecines traditionnelles. Si le pangolin transmettait le virus, ce serait à cause de l’utilisation que l’homme fait de cet animal.
Note finale
L’apparition du COVID-19 est un excellent exemple de la relation stricte entre la santé humaine et animale, l’état de l’écosystème et les habitudes humaines. Aujourd’hui, nous reconnaissons le fait que de nombreux virus existent depuis longtemps dans les hôtes naturels.
De même, nous savons également que la propagation constante des virus depuis leurs hôtes naturels aux êtres humains et autres animaux est en grande partie due aux activités humaines. Cela comprend les pratiques agricoles modernes et l’urbanisation. Par conséquent, le moyen le plus efficace de prévenir les zoonoses virales est de maintenir des barrières entre les hôtes naturels et la société humaine.
Enfin, dans le cas où le pangolin transmettrait le coronavirus, la manipulation de ces animaux nécessiterait une grande prudence. Ainsi, leur commercialisation devrait être strictement interdite en Chine et dans le reste du monde.
*Note importante: Le 24 février, la nouvelle attestant que le pangolin n’était pas à l’origine du coronavirus a été diffusée.
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