Crevette-mante : l'incroyable boxeur marin
Rédigé et vérifié par la biochimiste Luz Eduviges Thomas-Romero
La crevette-mante se présente sous différentes tailles, allant de 5 centimètres à 40 centimètres de longueur. Sa coloration varie également, puisque l’on a observé des spécimens bruns et aux couleurs frappantes. C’est le cas par exemple de la crevette-mante paon (Odontodactylus scyllarus). Elle peut aussi présenter des couleurs fluorescentes.
Ces crustacés invertébrés appartiennent à l’ordre des stomatopodes. Il existe environ 400 espèces différentes de crevette-mante et elles appartiennent toutes au sous-ordre Unipeltata. En général, elles sont connues sous divers noms : crevette-mante, homard boxeur et langoustine mante, entre autres.
La crevette-mante : prête pour le combat
Les stomatopodes sont des animaux prédateurs agressifs qui disposent de puissantes pinces. Il s’agit d’une paire d’appendices thoraciques en forme de pinces, dont la morphologie est similaire à celle de la mante religieuse. En fonction de la forme de ces pinces, on distingue deux groupes:
- Les espèces perforatrices possèdent des appendices épineux qui se terminent par des pointes ou des harpons. Ces espèces piquent leur proie avec force et rapidité
- Espèces broyeuses avec des appendices développés comme des garrots. Elles possèdent également une pointe rudimentaire. Le bras est alors utilisé pour matraquer et écraser la proie. Ces espèces reçoivent le nom de mante boxeuse parce qu’elles se battent très bien. Elles disposent aussi d’un bord tranchant à l’extrémité avec lequel elles peuvent couper leurs proies
En raison de leur vitesse et de leur férocité, ces deux types de stomatopodes peuvent vaincre des proies beaucoup plus grandes qu’elles. Des prises de proies huit fois plus importantes que leur agresseur ont été signalées.
Leur physiologie à l’origine du coup de grâce
Sans aucun doute, l’astuce du coup de grâce de ces crustacés est la vitesse. Mais être rapide sous l’eau est un processus complexe. En effet, pour y parvenir, en plus des muscles normaux, leurs bras contiennent des structures spéciales qui leur permettent de stocker et de libérer rapidement de l’énergie lors de coups brutaux. Leurs appendices sont chargés par un ressort musculaire.
Les coups portés par ces espèces de crevette-mante ont été mesurés à une vitesse pouvant atteindre 23 mètres par seconde (environ 50 mph). L’appendice de la crevette-mante est une structure élastique en forme de selle, qui est comprimée et piégée grâce à la contraction simultanée des muscles extenseurs et fléchisseurs. Au moment opportun, la crevette libère le loquet en relâchant le muscle fléchisseur, permettant ainsi le mouvement du garrot.
Si la crevette-mante ne tue pas avec son coup, elle tue par la peur
Les scientifiques ont déterminé qu’en raison de la vitesse du coup, l’attaque produit des bulles de cavitation. Il est intéressant de noter que la cavitation est un effet hydrodynamique dans lequel des bulles sont produites lorsqu’un fluide est soumis à des forces qui réagissent aux différences de pression.
Ainsi, les bulles formées se déplacent vers des zones de pression plus élevée et implosent. Autrement dit, la vapeur créée revient soudainement à l’état de liquide et les bulles se brisent. Pour cette raison, une grande énergie est libérée qui peut fissurer n’importe quelle surface dans le choc. Le phénomène s’accompagne généralement de bruits et de vibrations.
Les experts pensent que l’effondrement de ces bulles de cavitation provoque des forces qui frappent les proies à deux reprises. Ainsi, même si le coup initial échoue, l’onde de choc qui en résulte peut être suffisante pour étourdir ou même tuer la proie.
La crevette-mante possède un garrot ou une pince incassables
Pour frapper si fort sans casser leurs garrots, les crevettes-mantes possèdent un noyau spécial amortisseur dont la structure moléculaire ne ressemble à aucun animal que nous connaissons.
Par conséquent, la grande résistance aux impacts est due à la fameuse Structure de Bouligand, qui ressemble à du contreplaqué dans la couche extérieure. En plus, les pinces de ces crustacés possèdent deux couches:
- La couche supérieure est un matériel biocéramique minéralisé similaire à l’os, tandis que la couche inférieure est fibreuse comme une corde
- La couche interne, qui est plus résistance quand elle s’étire, fournit le support souple nécessaire. Sans elle, la frappe endommagerait le crustacé
Avec des armes différentes, des stratégies de chasse différentes
Il faut signaler que la plupart des espèces de crevette-mante ne broient pas, mais perforent. Chacune possède différents styles de chasse.
Les crevettes perforatrices chassent en sortant de leur tanière, à la recherche de proies sédentaires à la carapace dure. Elles les frappent ensuite afin de saisir l’intérieur doux et savoureux. Elles attrapent également des poissons, des calamars, et même des bébés requins.
Par ailleurs, les crevettes broyeuses sont des prédatrices en embuscade. Habituellement, elles attrapent leurs proies en se cachant silencieusement dans leur tanière jusqu’à ce que la proie se trouve à leur portée. Ces espèces utilisent leur capacité à attaquer les escargots, les mollusques, les crabes, et les huîtres des rochers.
Comme nous pouvons le voir, le monde des crevettes-mantes est beaucoup plus intriguant que ce que l’on pourrait croire. Par contre, il est très clair qu’il vaut mieux rester à l’écart de leur chemin lorsqu’elles s’apprêtent à frapper, sinon nous risquons de nous retrouver avec plusieurs os cassés.
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