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Les virus peuvent-ils altérer le comportement ?

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L'évolution des virus est due à leur capacité à s'adapter aux différents hôtes et circonstances, assurant ainsi une propagation réussie. Cet article vous aidera à en savoir davantage sur la manière stratégique d'infection de cet agent microscopique.
Les virus peuvent-ils altérer le comportement ?
María Muñoz Navarro

Rédigé et vérifié par la biologiste María Muñoz Navarro

Dernière mise à jour : 27 décembre, 2022

Saviez-vous que les virus pouvaient altérer le comportement des animaux ? Tout au long de l’évolution, les virus ont acquis différents mécanismes d’adaptation afin de garantir leur transmission à l’hôte. L’un d’entre eux est la modification du comportement des organismes vivants.

De nombreux arthropodes agissent comme vecteurs de transmission : tiques, puces, moustiques… La transmission a lieu lorsque le vecteur se nourrit du sang (comme les hématophages) ou d’autres substances comme la sève (dans le cas des plantes), infectés par un agent pathogène qui peut être une bactérie, un parasite ou un virus. Ils mordent ensuite les animaux ou les êtres humains qui agissent comme un hôte définitif.

En plus d’affecter leurs vecteurs, de nombreux virus entraînent des infections dans le propre système nerveux central des animaux. Causant alors des troubles du comportement. Dans cet article, nous évoquerons quelques exemples de stratégies adoptées par les virus pour favoriser leur propagation ultérieure.

Les virus qui peuvent altérer le comportement des vecteurs arthropodes

Le virus de la maladie bronzée de la tomate : ce virus appartient à la famille Bunyaviridae. Il affecte les cultures en modifiant le comportement alimentaire de son vecteur, le thrips (insecte de l’ordre thysanoptère).

Par ailleurs, les mâles infectés se nourrissent plus fréquemment que les mâles non infectés. Le virus stimule également la salivation jusqu’à trois fois plus. Tout cela conduit à une probabilité accrue de l’inoculation du virus dans la tomate.

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D’autres virus de cette famille, la Crosse (à l’origine de l’encéphalite de la Crosse) et le virus de la fièvre de la vallée du Rift, provoquent une augmentation de la fréquence des piqûres des vecteurs.

Virus de la Dengue : Aedes aegypti est le moustique vecteur du flavivirus provoquant des maladies telles que la fièvre jaune, la dengue, et la fièvre de Zika. Aussi bien chez les animaux que chez les humains.

Les femelles utilisent leur capacité olfactive pour trouver le meilleur endroit où pondre leurs oeufs. Le virus les affecte au niveau du système nerveux central en altérant leur processus olfactif. Et en élargissant la portée spatiale pour l’oviposition et la colonisation de nouvelles niches. En conséquence, le virus parvient à se propager à d’autres régions.

Nous voyons donc que cette capacité de changer le comportement du vecteur est intégrée dans les virus comme un mécanisme d’évolution et d’adaptation. Cela améliore leur transmission.

Les virus qui peuvent altérer le comportement à travers le système nerveux central

Les troubles dans le comportement des animaux malades sont liés aux changements de poids, de température, de préférence gustative, d’ingestion des aliments et de l’eau ainsi que des modes de sommeil.

Il est démontré que les virus jouent un rôle direct sur ces troubles du comportement. Par exemple :

  • Chez les souris néonatales, le virus de la maladie de Borna induit une préférence anormale pour le goût du sel
  • Le virus de la maladie de carré produit une perte de poids chez les chiens alors que chez les rats infectés, 5 à 10% augmentent leur poids de 300%
  • Des altérations des habitudes de sommeil causées par l’infection du virus de la grippe ont été observées chez les souris, et le virus de l’immunodéficience chez les félins

La capacité cognitive est associée au système neuronal et implique des activités d’apprentissage, de mémoire, motrices et motivationnelles.

L’infection virale peut affecter la capacité cognitive de manière directe ou indirecte

Les voies directes : elles comprennent des lésions des cellules neuronales dues à la propre réplication du virus. Ou parce que ses composants entraînent une lyse cellulaire: virus de la rage, virus de l’herpès simple.

Les voies indirectes : le virus engendre des dommages aux différentes cellules à travers des perturbations neuro-environnementales ou à la suite de réactions immunitaires de l’hôte à l’infection. Il a été suggéré que la sclérose en plaques, une maladie auto-immune, est initiée par une infection virale persistante.

Par ailleurs, les voies indirectes peuvent être liées au développement ou à l’aggravation de troubles neurodégénératifs comme Alzheimer ou Parkinson.

Virus en lien avec les troubles neurologiques

Influenza A : les souris infectées par ce virus (virus de la grippe) font preuve de changements dans leur comportement liés à l’anxiété et la cognition. Cela est dû à des modifications dans l’expression des gènes qui régulent les fonctions synaptiques dans l’amygdale, l’hypothalamus et le cervelet.

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Virus de la rage : comme vous le savez déjà, ce virus peut radicalement altérer le comportement des hôtes infectés. Une étude publiée dans Scientific Reports montre qu’une région de la glycoprotéine de ce virus agit en inhibant les récepteurs des neurotransmetteurs présents dans le système nerveux central.

Virus qui affectent d’autres organes

Le virus Séoul (hantavirus). Les réservoirs de ces virus sont les rongeurs de diverses espèces (chez lesquels ils ne causent pas de maladie). A travers la salive ou les selles, ils peuvent le transmettre à l’être humain. Et occasionner le syndrome pulmonaire de l’hantavirus. Une étude réalisée en Norvège sur des rongeurs a révélé que les mâles infectés se comportaient de manière beaucoup plus agressive que les mâles non infectés.

La présence de ce virus dans les poumons, les reins et les testicules pourrait être la raison de ce changement de conduite. D’autre part, l’agressivité conduit ces mâles à mordre davantage, ce qui favorise la propagation du virus à travers les blessures.

Les virus peuvent altérer le comportement

Comme nous venons de le voir, l’infection virale du système nerveux central peut entraîner des anomalies neurologiques. Mais aussi altérer le comportement. Par conséquent, nous pouvons dire que les virus -d’une certaine façon- ont cette capacité de modifier le comportement.

Une meilleure compréhension des effets de l’infection virale chronique ou persistante dans le SNC nous aiderait à mieux connaître le fonctionnement des mécanismes moléculaires liés aux troubles du comportement. Y compris chez les animaux.

 

 


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