Sentinelles du poison : les oiseaux qui combattent l'empoisonnement
Rédigé et vérifié par le biologiste Cesar Paul Gonzalez Gonzalez
Les rapaces se caractérisent par leur incroyable capacité à chasser leurs proies. Cependant, cela crée un conflit avec les agriculteurs, les aviculteurs et les éleveurs de lapins, car leurs animaux sont des proies faciles pour ces prédateurs. Dans ce contexte, les personnes affectées ont recours à l’empoisonnement pour tuer les rapaces et ainsi éviter des pertes économiques.
Le gros problème avec les appâts empoisonnés est qu’ils tuent tout organisme qui les mange. Par conséquent, non seulement les rapaces sont en danger, mais toute la faune environnante. Dans ce contexte, des animaux connus sous le nom de sentinelles du poison risquent leur vie pour mettre fin à cette pratique dangereuse.
Des appâts nocifs
Certains producteurs utilisent des restes de viande imprégnés d’insecticide pour tuer les rapaces. Bien que cela puisse sembler un processus rapide, les spécimens intoxiqués ont une mort douloureuse qui s’accompagne de convulsions, d’essoufflement et de spasmes.
Tout cela se produit quelques minutes après que l’oiseau a consommé l’appât. Cependant, la vitesse et l’efficacité dépendent du type de poison utilisé. Par exemple, en Espagne, l’insecticide le plus largement utilisé pour éradiquer les rapaces est l’aldicarbe, qui tue l’oiseau en seulement 15 minutes.
Les effets de l’empoisonnement
Les appâts empoisonnés ont pour mission d’éliminer les espèces « nuisibles » pour les humains et leur entreprise agricole. Cependant, dans de nombreux cas, ils finissent par affecter d’autres animaux qui n’ont rien à voir avec le problème. Parmi les animaux les plus touchés par cette pratique immorale, figurent les suivants :
- Rapaces. Parmi les plus communs, figurent le vautour noir, le vautour fauve, le vautour percnoptère et le milan royal. Ils représentent le groupe le plus touché (35 % des cas).
- Animaux domestiques. Des chiens se retrouvent intoxiqués accidentellement (21 % des cas).
- Carnivores terrestres. Le loup ibérique, l’ours brun et le lynx ibérique, sont aussi des victimes accidentelles de ces appâts (9 % des cas).
Selon ce rapport, entre 1992 et 2017, un total de 21 260 animaux empoisonnés sont morts. Cependant, il s’agit des quelques cas pour lesquels des preuves de l’événement ont été trouvées (environ 10 à 15 % du total). Pour cette raison, on pense que le problème est beaucoup plus grave.
Cette imprécision est due à l’impossibilité de récupérer tous les oiseaux morts empoisonnés. De plus, si les corps sont mangés par d’autres animaux, le problème s’aggrave, car des composés toxiques sont toujours présents dans leur viande. Par conséquent, les effets collatéraux s’accumulent, ce qui nuira davantage à la nature.
L’empoisonnement, une pratique illégale presque impossible à détecter
Au début des années 1980, l’empoisonnement des animaux sauvages était légal. Cependant, cette pratique est devenue trop populaire et a poussé de nombreuses espèces au bord de l’extinction. Pour cette raison, en 1989, plusieurs règlements ont interdit l’utilisation de ces substances, du moins en Espagne.
Les lois punissent d’emprisonnement et d’amendes l’utilisation d’appâts empoisonnés pour contrôler les rapaces. Malgré cela, de nombreux cas ne peuvent pas être détectés, car les preuves (les corps des animaux empoisonnés) ne sont pas trouvées. Par conséquent, le crime reste impuni et reste populaire encore aujourd’hui.
L’utilisation du GPS chez les oiseaux
Avec la technologie du GPS, il est possible de suivre les oiseaux pour observer leur comportement. Cette nouvelle technique de suivi est appelée télémétrie à distance et est devenue célèbre pour son utilité à l’heure de mieux comprendre l’écologie des animaux. De même, cette stratégie peut être utile pour lutter contre l’empoisonnement des rapaces.
Par exemple, en mars 2010, un vautour percnoptère marqué par un GPS a été empoisonné près de la mairie de Siruela (Espagne). Son corps a été récupéré grâce à cette technologie. Par la suite, une recherche a été lancée pour trouver le responsable de la mort de l’oiseau.
La justice n’est arrivée qu’en juin 2013, avec un procès qui a fait payer à l’agriculteur responsable de la mort du vautour une amende de 30 000 euros et 3 ans de désactivation de sa production. Ce fait a ainsi mis en évidence l’utilité de la technologie du GPS chez les oiseaux : non seulement il est possible de trouver le coupable, mais aussi d’avoir une preuve pour le procès.
L’empoisonnement des sentinelles qui risquent leur vie
En juillet 2021, le World Wide Fund for Nature a lancé son programme « Poison Sentinels ». Ce projet compte sur la participation de 6 oiseaux équipés de GPS, qui luttent contre la menace d’empoisonnement sur le territoire espagnol. Grâce à eux, des preuves peuvent être récupérées et les coupables des crimes peuvent être identifiés.
Ces oiseaux risquent leur vie pour que justice soit rendue à leurs compagnons. En effet, les sentinelles du poison meurent souvent dans la lutte contre ces pratiques illégales. Cependant, les cas ne restent pas impunis. Les 6 membres de cette équipe sont les suivants :
- Escobalón (le chef) : ce vautour noir mâle (Aegypius monachus) survole Madrid. Son fils Iruelo a été victime du poison.
- Jara (l’irascible) : ce milan royal femelle (Milvus milvus) plane dans le ciel de Castilla-La Mancha.
- Montejo (le marrant) : ce vautour percnoptère mâle (Neophron percnopterus) survole le plateau central de l’Espagne.
- Helm (le mercenaire) : ce milan royal mâle (Milvus milvus) survole la région centrale de la péninsule ibérique.
- Timón (l’incompris) : ce vautour noir mâle (Aegypius monachus) couvre la région sud de l’Espagne.
- Salvia (l’unificateur) : ce milan royal femelle (Milvus milvus) est chargé de protéger la région d’Estrémadure, d’Andalousie et du Portugal.
L’utilité de la technologie dans la conservation
Grâce au GPS, les oiseaux peuvent devenir des sentinelles et risquer leur vie pour protéger leurs semblables de l’empoisonnement. Ce crime ne passera donc plus inaperçu, ce qui permettra de sauver plusieurs espèces menacées. Même si cela n’en a pas l’air, la technologie peut être un puissant allié pour assurer la conservation des animaux.
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